En cette période d’incertitude, les touristes, nomades et explorateurs se demandent quel sera l’impact de la COVID19 sur leurs plans de voyage au cours des prochains mois, voire au cours des prochaines années.
Le transport aérien reprendra ultimement sa place en raison de son rôle essentiel pour déplacer des passagers et du cargo sur de longues distances et sur de courtes périodes. Cependant, la gestion de la présente crise par chaque pays impactera le niveau de confiance des voyageurs. Ainsi, il sera important d’adopter une approche globale et coordonnée pour la prévention et mitigation de la COVID19 et de futures pandémies.
Tout comme ce fut le cas après les attentats du 11 Septembre 2001, il faut s’attendre à observer plusieurs changements invasifs pour l’expérience du passager. Les aéroports auront à nouveau un rôle de premier plan puisqu’ils représentent un point d’entrée pour un pays ou région et donc un front à défendre dans la bataille contre la propagation de maladies contagieuses.
À L’origine
L’aviation est un mode de transport qui n’était pas encore mature lors de la pandémie de grippe espagnole en 1918, de la grippe asiatique en 1957 et de la grippe de Hong Kong en 1968. Cependant, de plus récentes éclosions comme celle du SRAS (2003), de la grippe aviaire (2005), de la grippe H1N1 (2009), du MERS (2012) et de l’Ébola (2014) ont tous démontré le rôle de l’aviation dans la propagation rapide de maladies, mais rien de l’envergure que nous observons aujourd’hui.
Pourtant, le risque associé à la transmission de maladies contagieuses est identifié dès la création de l’Organisation pour l’Aviation Civile Internationale (OACI) en 1944 dans la Convention de Chicago qui a établi les principes du développement du transport aérien international.
Une impression de déjà-vu…
À la suite des attaques du 11 Septembre 2001, des réformes aux processus de sécurité ont été instaurées pour prévenir des événements similaires. Initialement, les armes et lames de couteau ont été contrôlées plus étroitement. Par la suite, les souliers (2001) et les gels et liquides (2009) ont fait l’objet d’une inspection accrue en raison d’attentats ratés.
Pour les pandémies, les efforts ont historiquement été plus régionaux, limités à certaines destinations affectées par l’épidémie de SRAS. Certains aéroports comme Hong Kong surveillent la température des passagers internationaux à leur arrivée depuis plus d’une décennie. Au Canada, cette mesure testée en 2003 n’avait pas eu les résultats escomptés selon une étude produite notamment par Dr.Theresa Tam, aujourd’hui Administratrice en chef de la santé publique du Canada.
La présente crise aura pour effet d’entraîner de nombreux changements à votre expérience dans un aéroport. En l’absence d’une solution unique, quatre (4) grands axes d’intervention sont à prévoir.
Communication
Premièrement, il faut s’attendre à de la communication incessante des transporteurs aériens, de l’aéroport et des agences gouvernementales. On vous rappellera l’importance de se laver les mains, de pratiquer la distanciation physique ou de s’abstenir de voyager si vous êtes symptomatique. On communiquera d’abord ces messages à l’achat de votre billet, particulièrement si un test médical est nécessaire avant votre départ.
Les panneaux d’affichage et les annonces audiovisuelles renforceront ce message du débarcadère à votre siège. Jusque-là, rien de trop grave mais rien pour vous mettre dans l’ambiance des vacances.
Prévention
Dans un second temps, il faudra adopter des gestes de prévention et distanciation. Ceci inclura de se laver les mains ou de tenir ses distances dans les files ou zones d’attente.
Par ailleurs, le Canada a rapidement exigé le port du masque aux endroits où la distanciation ne peut être respectée. Ceci inclut les points de fouille et à bord des avions. De plus en plus d’aéroports et de lignes aériennes ont emboité le pas et imposent maintenant le port du masque.
À plus long terme, vous utiliserez davantage les outils d’enregistrement libre-service comme les kiosques, votre téléphone intelligent et les dépôts-bagages automatisés. Combiné aux outils biométriques, vous limiterez ainsi les contacts avec des employés et autres passagers à l’embarquement et à l’immigration.
Quant à eux, les plus grands aéroports internationaux déploient également certaines initiatives de désinfection plus ambitieuses. Bien que spectaculaires et efficaces, ces outils servent principalement à redonner confiance aux passagers.
Dépistage
Le dépistage inclura à minima des questions lors de votre enregistrement ou à votre arrivée. Ces questions identifieront si vous avez des symptômes ou si vous avez voyagé vers une destination à risque récemment. Certains pays déploieront des points de prise de température ou d’autres outils sans contact d’analyse de vos signes vitaux. À nouveau, ces initiatives ont une efficacité limitée et ont comme principal objectif de redonner confiance aux passagers.
Certains, comme les aéroports de Narita (Japon) et Hong Kong, testent systématiquement pour la COVID19 tous les passagers internationaux. En attendant vos résultats qui peuvent prendre plus d’une journée, Narita a installé des lits en carton, avec futon.
À Hong Kong, les passagers sont mis en quarantaine dans un centre de congrès en attendant leurs résultats de test. Une telle situation ne peut être envisagée dans le cadre d’un retour à la normale.
Ultimement, un passeport-santé ou certificat médical reconnu internationalement serait optimal pour vous permettre de voyager l’esprit tranquille. D’ici la découverte d’un vaccin, il pourrait s’agir d’un test sérologique (test d’anticorps) ou d’un écouvillonnage (test des acides nucléiques par “swab”) effectué dans les jours avant votre départ. Il reste cependant beaucoup de chemin à faire tant au niveau médical que politique avant l’adoption d’une telle pratique.
Surveillance et Traçage
Ce dernier axe d’intervention est controversé en raison des implications pour le droit à la vie privée. Lors de votre arrivée en sol étranger, vous devez souvent fournir photo, empreintes digitales et principal lieu de séjour. On pourrait dorénavant vous demander d’installer une application de traçage sur votre téléphone intelligent.
Dans plusieurs pays comme la Chine, l’Islande et Israël, cette technologie implique de vous géolocaliser. Bien que cela identifie les zones d’infection, il y a des craintes légitimes quant à son utilisation à d’autres fins.
Voyagez Moins, Voyagez Mieux?
Rester chez soi aujourd’hui, c’est pouvoir voyager demain. Cette situation aura un impact prolongé sur les voyages par avion. Un regain initial des vols domestiques sera suivi d’une réouverture progressive des frontières internationales mieux coordonnée qu’à la fermeture (on l’espère du moins…). Les lignes aériennes seront sélectives au cours de la relance de leurs opérations ce qui pourrait entraîner des hausses de prix vers plusieurs destinations. Le flygskam (flight shaming) nous rappellera qu’une autre crise est à nos portes soit celle des changements climatiques.
Dans le milieu des affaires, tous ces facteurs amèneront les entreprises à reconsidérer leurs modes de communication au détriment de courts voyages. Quant à eux, les séjours à l’étranger nécessiteront une meilleure préparation pour palier aux imprévus. Une couverture d’assurance-voyage adaptée à cette nouvelle réalité sera essentielle.
Certains voyageurs de loisir rechercheront des destinations sécuritaires, accessibles directement ou situées à proximité. D’autres, plus aventuriers, opteront pour de plus longs séjours bien planifiés vers des destinations moins fréquentées. Le tourisme hors-saison ou en zone rurale sera aussi à privilégier afin d’aplatir la courbe de la demande touristique.
Prenons un moment pour rêver, planifier et réinventer la nouvelle forme que prendra le tourisme durable. Peu importe l’approche adoptée, notre désir de créer des ponts aura ultimement le dessus sur les barrières actuelles et contraintes à venir.
Photo de couverture: YUL Aéroport international Montréal-Trudeau